article paru dans le OUEST FRANCE le 31 août 2021
PORTRAIT. À Alençon, la dernière rentrée de la cantinière Michelle Colmant à l’école Sainte-Thérèse
À la cantine ou à la garderie de l’école Sainte-Thérèse d’Alençon (Orne), les enfants l’appellent Madame Colmant depuis vingt-six ans. Mauricienne d’origine, elle retournera sur son île maternelle l’an prochain.
« C’est quelqu’un d’exceptionnel. Elle est dynamique, disponible. Elle donne sans compter. » Kristell Chwieducik, directrice de l’école primaire Sainte-Thérèse d’Alençon (Orne), n’a pas assez de mots pour dire tout le bien qu’elle pense de Michelle Colmant. Cantine, garderie, ménage : depuis vingt-six ans, elle officie dans l’établissement. Pas question, donc, de taire le fait que, ce lundi 30 août 2021, c’est sa dernière rentrée.
« Elle est irremplaçable ! »
Les compliments, le portrait dans le journal… Michelle pense que c’est un peu trop. Mais, « elle est irremplaçable, s’exclame Kristell Chwieducik. Chaque jour, elle assure à elle toute seule, trois services de repas pour 110 enfants. À la garderie, elle aide les élèves de CP à faire leurs leçons et à lire. Elle aime beaucoup les enfants, elle sait comment en prendre soin », insiste la directrice.
Michelle Colmant est arrivée un peu par hasard à l’école Sainte-Thérèse. « Un jour, mes enfants qui y étaient scolarisés m’ont dit que la dame de la cantine partait en vacances, en fait, elle prenait sa retraite. » La mère de famille postule, est retenue. « Et les années ont passé vite, tellement vite que je ne me suis pas rendu compte que cela faisait si longtemps. »
Mariée à un Mayennais
L’histoire de Michelle n’est pas tout à fait ordinaire. Née à l’île Maurice, dans l’océan Indien, elle est la quatrième d’une fratrie de cinq enfants. Après des études de dactylographie, elle vit encore chez ses parents lorsqu’elle répond à une annonce dans un magazine pour correspondre avec un Français. « J’avais un frère et une sœur qui vivaient déjà en France, explique-t-elle. Et je ne voulais pas épouser un Mauricien. »
Deux ans d’échanges de lettres plus tard, « le 26 août 1983 », se souvient Michelle, elle atterrit à Roissy et rencontre Alain, un Mayennais de Saint-Pierre-des-Nids, avec lequel elle se marie le 12 novembre. Le couple s’installe dans le quartier de Perseigne. Il est tourneur, elle travaille à l’usine, cherche des stages, puis reste à l’appartement. « J’ai eu un peu de mal à m’adapter, au début », avoue-t-elle.
« Une école familiale »
Il y a le climat auquel il faut s’habituer. « Ma belle-mère me tricotait de gros pulls », sourit Michelle. L’Ornaise d’adoption peine aussi à s’habituer « aux portes fermées, aux voisins qui ne disent pas bonjour. Chez nous, c’est tellement différent. » Le bonheur s’étoffe cependant avec la naissance de Jérémie, Émilie et Kevin, en 1989, 1990 et 1992. Trois enfants dont elle s’avoue très fière, aujourd’hui. Ainsi que d’Evana, sa petite-fille de 16 mois.
D’abord investie au sein de l’association de parents d’élèves de l’école Sainte-Thérèse, Michelle y a aussi enseigné le catéchisme, puis elle y a été embauchée. « Au départ, il n’y avait que vingt enfants à la cantine. Depuis, cela a beaucoup évolué, il y a eu énormément de changement. Mais c’est toujours une petite école familiale dans laquelle tout le monde se connaît, on y est bien. »
En juillet 2022, Michelle quittera la rue des Tisons ainsi que sa maison d’Alençon pour s’installer près de Grand-Baie, dans le nord de l’île. Car son mari Alain, retraité depuis deux ans, est impatient d’aller couler des jours paisibles sous le soleil. « J’aurai un pincement au cœur, c’est sûr, avoue-t-elle. Mais j’ai dit aux maîtresses qu’elles auront désormais un pied à terre pour venir à Maurice ! »